En février 2013 l’AESSFG, forte de son expérience au Guépelle, décide de mener les démarches de mise en valeur et d’étude du site connu comme le stratotype du Cuisien :
Petit résumé de l’historique du site Géologique de Cuise la Motte
Cliché d’A. Robin (1925)
Cliché AESSFG (2019)
Le Cuisien est un ancien « étage », une subdivision des temps géologiques, créé par G. Dollfus en 1877, correspondant à un laps de temps géologique compris entre 53 et 49 millions d’années b.p. (« before present »). G. Dollfus avait pris pour référence les affleurements sableux à l’ouest du village de Cuise-la-Motte. Le Cuisien est aujourd’hui réuni avec le Sparnacien (Dollfus, 1880) pour constituer l’Yprésien (Dumont, 1839). Le Cuisien correspond à sa partie supérieure et tend de ce fait à prendre le statut de sous-étage régional. Le terme de Cuisien n’est plus retenu dans l’échelle stratigraphique internationale. Il conserve, à l’échelle du bassin parisien, une indéniable valeur pour l’histoire de la géologie mais aussi comme repère lithostratigraphique. La sablière de Cuise-la-Motte reste le stratotype historique de l’étage Cuisien, c’est-à-dire sa localité de référence unique. L’étage Yprésien, a été défini par A. Dumont en 1839 à Ypres, une ville située à l’ouest de la Belgique. Il représente un ensemble de niveaux géologiques tantôt argileux, sableux ou glauconieux. Il faut toutefois reconnaître que son stratotype, ne montrent plus actuellement de manière significative d’affleurement conséquent et étudiable. De plus, en son temps, A. Dumont, était resté imprécis sur la localisation des coupes étudiées (Steurbaut, 2006). De nos jours l’Ypresien belge n’est d’ailleurs plus représenté que par des exploitations temporaires d’argiles (Mark clay pit) et par des sondages profonds (Kallo borehole), qui n’offrent pas de conditions d’observation pérenne pour l’étude de ses niveaux. E. Steurbaut situe l’Yprésien belge entre -55 et – 49 millions d’années, représenté à sa base par le Landénien, équivalent du Sparnacien en France, et le Paniselien, équivalent du Cuisien en France. Ces deux sous-unités correspondent aux faciès saumâtres et marins que réunit l’Yprésien. La composition et la préservation de ses faunes fossiles (mollusques, crabes, fruits de Nypa) sont très semblables à celles que l’on peut observer de nos jours dans les argiles du London Clay de la presqu’ile de Sheppey, en Angleterre (obs. pers.). Bien que riches et variées, ces faunes se conservent très difficilement car elles sont constituées de pyrite, un sulfure de fer qui s’oxyde rapidement à l’air libre. On peut en conclure que le stratotype de l’Yprésien, défini à Ypres en Belgique, ne montre plus de coupe géologique exploitable pour la science et les fossiles récoltés (dans des communes voisines) ou par des sondages ont une conservation très médiocre. En conséquence, le stratotype du Cuisien à Cuise-la-Motte reste une des rares localités accessibles et sans doute la plus intéressante du point de vue paléontologique pour l’étude de l’Yprésien dans le bassin franco-belge.
La littérature concernant le Cuisien de Cuise-la-Motte, est très parcellaire et il faut compulser de nombreux ouvrages pour se faire une idée de ce qui a été écrit sur cette localité classique de la géologie parisienne.
ð Melleville, en 1843, analyse « les sables inférieurs » correspondant au Cuisien actuel, en décrivant des espèces provenant de Cuise-la-Motte. ð Graves, 1847, cite le site de « Cuise-Lamotte » avec autant d’intérêts dans son Essai sur la topographie géognostique du département de l’Oise. C’est dans cet ouvrage que l’on évoque le site de Cuise avec autant d’intérêts.
ð De Raincourt entre 1870 et 1877 décrit de nombreuses espèces fossiles des sables « inférieurs de Cuise ». Il fait de nombreuses références à G. Deshayes son contemporain, qui dès 1824 avait figuré de nombreux mollusques provenant de Cuise.
ð G. Dollfus analyse en 1877 la superposition des Sables de Cuise sur le Sparnacien.
ð Vélain en 1878, conduit une excursion géologique à Cuise où il visite et décrit la butte des Usages, le Fond-Couturier ainsi que les sites de Trosly-Breuil et de Pierrefonds, encore accessibles à cette époque.
ð De Boury, 1884, décrit un ensemble de fossiles « rares » en provenance de Cuise-la-Motte.
ð Chelot, 1885, décrit un certain nombre d’espèces de mollusques fossiles récoltés à Cuise-Lamothe (sic), sans préciser à quel niveau de la coupe en particulier se rapportent ces fossiles.
ð Munier-Chalmas, 1900, relate le compte rendu d’une excursion géologique à Cuise-la-Motte.
ð Viguier et Fritel, 1911, décrivent un bois fossile, en provenance des Sables de Cuise, sans rattacher sa découverte à une faune environnante de mollusques et d’autres organismes fossiles.
ð M. Cossmann et C. Pissaro figurent une importante partie des mollusques spécifiques de Cuise, dans leur fameuse iconographie datée de 1904. Déjà à cette époque, ces mollusques avaient été collectés par des amateurs éclairés.
ð L. Feugueur, 1963, dans un volumineux mémoire sur l’Yprésien (près de 600 pages !), consacre trois pages aux sites de Cuise et de Trosly-Breuil. Il n’apporte pas d’information nouvelle, se contentant de faire la synthèse des connaissances de l’époque sur les Sables de Cuise et de dresser une liste de fossile qui reste néanmoins la plus exhaustive à ce jour, dans la littérature.
ð L. Gougerot 1967-1969, s’attache particulièrement à décrire un ensemble de petits mollusques en provenance de Cuise. Il les replace dans leur contexte systématique, mais n’aborde en aucun cas leur contexte écologique. Ces microgastéropodes de la Famille des Pyramidellidae, sont des ectoparasites d’Echinodermes (oursins, concombres de mer, étoiles de mer), ces Echinodermes n’ont pas ou peu laissé de traces fossiles à Cuise, mais leur existence est confirmée par la présence importante de ces micro-mollusques.
ð Bolin, 1982, décrit un ensemble de sondages profonds, qui recoupent une partie de l’éocène inférieur.
ð B. Dutheil, 1991 décrit une liste réactualisée des vertébrés marins recueillis à Cuise-la-Motte. Il s’agit à ce jour de la seule étude sérieuse relative aux requins et raies, concernant cette localité.
ð Gaudant, 2004, met en évidence, un certain nombre de sites géologiques « remarquables » du bassin de Paris, dont Cuise-la-Motte, faisant état de son rôle à travers l’histoire des géosciences dans le bassin parisien, de manière succincte.
ð Symonds, 2009, met en évidence les caractères de la Nerita (pseudodostia) tricarinata en provenance de Cuise, sans apporter de clarifications concernant son milieu et ses particularités écologiques.
ð Malcom et Pacaud, 2010 décrivent une espèce très rare en provenance de Trosly- Breuil : Cuisonerita, qui est déposée dans les collections du London Museum.
On constate donc, qu’à travers ces quelques 17 publications, où les Sables de Cuise (incluant Trosly-Breuil et les Gorges du Han) ont fait l’objet d’études concernant des cas particuliers, ici ou là, l’étude d’un mollusque, un compte rendu d’excursion, ou encore une liste non commentée ou critique d’invertébrés marins, les connaissances concernant cette zone sont particulièrement incomplètes et parfois erronées.
L’étude fine des Sables de Cuise de toute cette zone étendue aux Gorges du Han, reste à réaliser !
L ‘AESSFG a donc lancé une étude regroupant plusieurs aspects scientifiques : Géologie, Paléontologie et Paléoécologie de ce Géosite.